La résolution environnementale initiée par Alain Destexhe a été approuvée ce 24 novembre en séance plénière du Sénat. Retour sur ce texte voué à la lutte contre les microbilles de polyéthylène et la pollution en mer du Nord.
Dernière étape franchie, ce vendredi 24 novembre, pour la résolution proposée par le Sénateur MR Alain Destexhe et consacrée à la lutte contre les microbilles de polyéthylène. Un texte qui, en commission, avait fini par être jumelé avec une autre proposition (émanant du Sénateur sp.a Bert Anciaux) centrée sur la pollution par les plastiques, notamment en mer du Nord.
La résolution a donc été approuvée en séance plénière du Sénat.
Voici, ci-dessous, le discours prononcé par Alain Destexhe a cette occasion:
« Madame la Présidente,
Je tiens tout d’abord à remercier mes collègues pour le travail accompli dans ce dossier, que nous avons pu clôturer ce lundi en commission des Affaires Régionales. Chaque groupe a fait des propositions intéressantes que nous avons intégrées au texte initial et qui sont sans aucun doute venues le renforcer. L’ambiance de travail fut constructive et a permis d’ailleurs de dégager de larges compromis, loin des querelles politiques. A ce titre, je salue les qualités de médiation de Monsieur Vanackere qui a mené les réunions de travail dans le respect des points de vue de chacun. Je remercie également les services et le secrétariat de la commission pour leur travail au quotidien qui facilite celui des parlementaires.
Je me félicite de l’adoption de cette proposition de résolution, et je vais résumer ici les principaux éléments qu’elle contient. Notre commission s’occupe depuis un an de ce texte, à l’initiative de plusieurs Sénateurs qui ont saisi l’importance de ce sujet et les risques que posent la pollution plastique et les microbilles dans l’environnement marin.
En effet, alors qu’elle a longtemps été ignorée du grand public, la pollution plastique en mer, et particulièrement celle causée par les microbilles de polyéthylène, est devenue un sujet de préoccupation majeure tant les dégâts causés sont importants et les effets à long terme inquiétants.
Chaque jour, ce ne sont pas moins de 8000 milliards de microbilles issues des gels douche, dentifrice et autres qui rejoindraient les habitats aquatiques aux Etats Unis, alors qu’on relève la présence de 50 kilos de déchets plastiques par kilomètre de plage dans notre pays. Un constat alarmant, d’autant que la pollution qui en résulte n’est pas le seul facteur à prendre en compte. Ces microbilles pénètrent au plus profond du tissu musculaire des animaux marins, atterrissant in fine dans nos assiettes et contaminant nos propres organismes avec des conséquences encore difficilement mesurables mais dont les premiers indices confirment que les effets nocifs sont bien réels.
Plusieurs pays l’ont compris, et le Programme des Nations Unies pour l’environnement lui-même ne s’y est pas trompé en inscrivant la pollution par les microbilles comme une priorité dans son dernier rapport annuel. Je me réjouis donc qu’au niveau belge, le Sénat, sous l’impulsion du groupe MR, ait pris l’initiative d’alerter les différents gouvernements sur le sujet, avec des demandes très précises (que je détaillerai ci-après). Il est d’autant plus louable que le Sénat se soit saisi de cette question au vu de sa transversalité, les compétences en matière de protection de l’environnement, de transport maritime et également de régulation des produits étant largement partagées entre les Régions et le Fédéral. Notre assemblée a ainsi parfaitement joué son rôle de coordination entre les différents niveaux de pouvoir.
Dans ce cadre, et en vue de la préparation de notre texte définitif, nous avons entendu la Ministre fédérale Marie Christine Marghem ainsi que le Secrétaire d’Etat Philippe De Backer, tout en prenant en compte l’avis des ministres régionaux qui nous ont transmis leurs observations par écrit. Nous n’avons également pas oublié les représentants de l’industrie et de la société civile, qui nous ont apporté un éclairage essentiel sur la gestion des plastiques, et des microbilles en particulier. L’industrie peut et doit d’ailleurs être une force de changement en modifiant ses pratiques et en trouvant les alternatives aux microbilles dans leurs produits.
Au travers du texte que nous votons aujourd’hui, nous avons tenté autant que faire se peut de traduire le constat partagé par la plupart de nos interlocuteurs en recommandations claires pour les différents gouvernements concernés, dont je citerai ici les plus importantes, soutenues par le MR :
La nécessité de développer un plan d’actions global, assortis d’objectifs clairs, pour réduire l’utilisation du plastique :
c’est en effet via une action coordonnée que nous pourrons évaluer les progrès à réaliser.
Inclure les entreprises et les fabricants de produits cosmétiques, de gel douche, de dentifrice et autres dans la définition d’une stratégie visant à l’interdiction des microbilles :
Le MR a à cœur de privilégier le dialogue avec les acteurs industriels, qui bénéficient d’une expertise indéniable et peuvent être associés à l’action publique pour devenir des moteurs de changement.
Accentuer la sensibilisation des citoyens via des campagnes d’information leur permettant de poser des choix en toute connaissance de cause :
Il convient en effet de poursuivre la conscientisation des citoyens leur garantissant la liberté d’un choix informé sur leur mode de consommation.
Responsabiliser les producteurs et les consommateurs à l’utilisation du plastique et limiter les déchets sauvages, en accentuant les efforts sur le tri des déchets PMC ;
Analyser le cycle de vie des produits plastiques et de déterminer dans quelle phase de la chaîne de production et de consommation le plastique se perd dans l’environnement :
Ce sont au total 17 recommandations qui vont être adressées aux gouvernements et doivent être traduites en actes législatifs ou en actions concrètes. Je salue d’ailleurs le plan validé hier par le gouvernement fédéral, à l’initiative du Secrétaire d’Etat Philippe De Backer, sur la pollution plastique en Mer du Nord. Ce plan prévoit d’associer les Régions à la réflexion, doit également inciter les entreprises à trouver des solutions alternatives aux microbilles. C’est la preuve que le travail de notre assemblée a payé.
Pour notre groupe, il est essentiel de prendre ces questions d’environnement et de santé publique à bras le corps. Si rien n’est fait, le coût de la pollution plastique sera énorme, tant en matière environnementale que pour nos finances publiques. La poursuite des actions en la matière est donc essentielle. Si quelques avancées significatives ont été réalisées, notamment avec l’interdiction des sacs plastiques à usage unique, il convient d’aller plus loin, avec l’aide de l’Union européenne notamment.
Et à ce titre, Madame la Présidente, j’aimerais clôturer par une réflexion plus globale.
Il est évident que cette question doit être menée de front par les différents niveaux de pouvoir de notre pays. C’est bien pour cela que le Sénat a pris l’initiative de rédiger cette proposition de résolution. Toutefois, nous sommes conscient que ce n’est qu’en menant le combat au niveau européen que de réels progrès pourront être réalisés.
En effet, l’Union européenne doit être le lieu de décision privilégié sur de tels sujets, et notre proposition de résolution a pour ambition de faire de la Belgique un moteur de changement auprès de ses partenaires européens.
Ainsi, les Recommandations 3 et 15 de notre proposition invitent la Belgique à insister auprès de l’UE sur la nécessité d’établir une feuille de route en concertation avec tous les secteurs concernés, en vue d’éliminer progressivement les microbilles et les particules de plastiques dans toute une série de produits.
C’est d’autant plus vrai alors que la Commission européenne doit prochainement présenter une Stratégie sur le plastique, qui doit fixer de nouvelles normes de recyclage et ne pourra éviter la question de la pollution en mer par les microplastiques.
Il reste beaucoup de pain sur la planche, mais notre assemblée peut se féliciter de son engagement sur ce sujet. J’espère que notre travail permettra de poursuivre les efforts de conscientisation et que les recommandations que nous avons formulées seront dûment prises en compte par les différents gouvernements compétents. Nous devrons y veiller. Il s’agit d’une question d’avenir qui dépasse toute opposition politique, comme nous avons pu le montrer au Sénat.
Je vous remercie. »