« Un outil précieux au service des patients »
Lors de l’examen du point « Santé mobile » en plénière, le Sénateur Jacques Brotchi a eu l’occasion de s’exprimer sur le sujet : en tant que rapporteur puis pour porter la voix du Groupe MR.
Rapporteur mais aussi porte-parole du Groupe MR, le Sénateur Jacques Brotchi est monté à la tribune à deux reprises, lors de la séance plénière durant laquelle a été adopté le rapport d’information sur la santé mobile (plus d’infos par ici).
C’est surtout par le biais de son discours politique qu’il a pu livrer son point de vue sur la question.
A lire ci-dessous en intégralité.
« Madame la Présidente,
Chers Collègues,
Certaines thématiques, jusqu’alors méconnues ou peu médiatisées, prennent un sens particulier lorsque des défis de société s’amorcent : la santé mobile en fait partie. En tant que Sénateur libéral, je ne peux séparer la santé mobile de la question du progrès tant elle a la capacité de transformer et de moderniser la pratique des soins. La santé mobile est et demeure un outil, un outil précieux au service des patients, des prestataires de soins et plus généralement de la société elle-même.
Face au vieillissement de la population, au poids du coût des soins de santé en constante augmentation pour la collectivité mais également au développement rapide de la technologie et de ses composantes, l’essor sans précédent des applications de santé mobile prend tout son sens.
Les technologies mobiles sont en train de devenir une ressource importante pour la fourniture de services de santé car elles sont faciles à utiliser, touchent de nombreuses personnes et sont largement acceptées. En 2015, l’on ne dénombrait pas moins de 7 milliards d’abonnements de téléphonie mobile, dont plus de 70 % dans des pays à revenu faible ou intermédiaire. Dans bien des endroits, on a plus facilement accès à un téléphone mobile qu’à l’eau potable, à un compte bancaire ou à l’électricité.1 Le marché des applications mobiles de santé est ainsi en plein essor depuis quelques années. De 6000 applications « grand public » en 2010, nous sommes passés à 100 000 applications recensées en 2013 pour atteindre aujourd’hui le nombre titanesque de 3,5 millions. Dans la décennie à venir, nous parlerons très probablement de milliards d’applications mobiles. Ces applications sont téléchargeables et accessibles à tous les individus, qu’ils soient médicalement qualifiés ou non.
Mais si la santé mobile répond à des défis de société, elle pose à son tour de nouvelles questions :
Comment faire évoluer la formation du personnel soignant pour être en adéquation avec les nouvelles technologies ?
Quelle place donner aux applications de santé mobile dans le parcours de soin « classique » ?
Comment envisager une éventuelle nouvelle mouture de la relation patient-médecin ?
En quoi la santé mobile pourrait-elle être la clé de voûte de la transformation positive du secteur des soins ?
Que ce soit au travers du cadre éthique, de la labélisation et de la sécurisation des objets connectés et des applications, de l’influence de la santé mobile sur le patient ou encore des questions de déontologie qui se posent au personnel soignant, le travail de notre commission fut de prendre en compte ces différents aspects et questions pour baliser la structure de notre rapport.
Que l’on considère la santé mobile et les applications qui en découlent sous l’angle de la prévention et de la promotion de la santé, du bien-être ou encore de la technologie au service des soins de santé, il est évident que les niveaux de compétences s’enchevêtrent et sont du ressort tant des Régions que des Communautés ou du Fédéral. Le Sénat, réel carrefour et lieu de rendez-vous entre les différents niveaux de pouvoir, avait, dès lors, un rôle important à jouer pour porter ce débat de société. Il représente l’instance la plus à même de s’attaquer à cette thématique car il peut formuler des propositions constructives à l’intention des différentes autorités politiques du pays, des acteurs du monde scientifique et économique tout en éveillant les consciences des citoyens quant à cette opportunité pour leur maintien en forme, leur bonne santé, leur guérison mais également leur mieux-vivre avec la maladie.
Ce travail de réflexion, réalisé en parfaite collaboration avec les rapporteurs des autres groupes politiques, a permis de dégager des recommandations articulées autour de divers thèmes qui formalisent les contours de la santé mobile.
Parmi toutes ces recommandations formulées, je souhaiterais en mettre quelques-unes plus particulièrement en exergue.
Tout d’abord, la labélisation et la certification des applications qui sont et seront utilisées par les professionnels de la santé. Face à l’absence de réglementation qui régisse l’utilisation des applications mobiles de santé, comme j’ai pu le dire dans mon discours de rapporteur, notre commission a donc développé une recommandation qui tienne compte de cette nécessité de labélisation en demandant que les applications soient obligatoirement dotées d’un label attestant de leur qualité et de leur fiabilité via un portail national qui passerait en revue ces applications. Selon nous, le KCE ou l’AFMPS, en collaboration avec des centres de recherche, pourrait devenir cet organe indépendant.
Toujours dans cette optique de certification, il nous a semblé important de prévoir une recommandation qui mette en place un cadastre national des initiatives wallonnes, flamandes et bruxelloises des plateformes et data centers qui existent déjà, via des accords de coopération, afin d’avoir une vue d’ensemble de la situation et éviter ainsi les doublons, la perte de données,…
Si la qualité des applications est un enjeu de taille, il en va de même pour l’intégration de celles-ci dans le parcours de soins au vu des coûts que cela pourrait engendrer. Actuellement, il est toujours prévu, qu’un acte médical ne peut être pratiqué que si patient et médecin sont physiquement présents, ce qui prohibe un quelconque remboursement des solutions de santé mobile. Notre commission recommande ici d’élargir les codes de nomenclature actuellement utilisés pour permettre un remboursement effectif de l’application.
Il a nous également semblé important, dans cette volonté d’agréger les centres de recherches indépendants, les spin-offs et les start-ups qui évoluent dans le domaine de la santé mobile, de veiller à donner suite à la demande de la Cour des Comptes de développer un Health Research System, un forum de concertation pour l’harmonisation stratégique entre les centres d’expertises fédéraux au niveau des soins de santé et dans leur relation avec les centres d’expertise à d’autres niveaux de pouvoir. Comme je l’ai dit précédemment, le Sénat, dans sa nouvelle mouture, est une réelle plus-value pour veiller à la bonne collaboration de tous les niveaux de pouvoir.
Une dernière recommandation que je souhaiterais citer est la nécessité de proposer aux professionnels de la santé une formation continue pour leur permettre une transition vers une médecine connectée la plus harmonieuse qui soit.
Au vu de l’énoncé des diverses recommandations mais également de toute l’architecture du rapport dont il est ici question, je demeure convaincu que la santé mobile constitue un formidable outil au service de notre système de soins de santé en pleine mutation. Si le train de la santé mobile est un train à (très) grande vitesse qui n’a de cesse de parcourir des kilomètres vers une santé toujours plus connectée et performante, le présent rapport est l’occasion pour nous de montrer que nous sommes conscients de mutations qui se posent à nous et que ce train nous ne souhaitons nullement le rater.
C’est pourquoi mon groupe et moi-même soutiendrons pleinement ce rapport. »